Nouvelles conférences, projection et présentation. Bienvenue sur les sentiers du monde !

Mise en page du livre

A notre retour en Suisse, nous avons réalisé un livre et un film de notre voyage.

Afin de vous donner une petite idée du contenu du livre, voici quelques planches de double-page. Le format réel d'une page est de 26/26cm.

A la suite de cet article, vous trouverez l'intégral des textes et photos publiées au cours de notre voyage. Bonne visite !

Envie de commander le livre ou le DVD ? Retrouvez nous sur notre nouveau site www.chasseurs-d-horizon.com







































Terminons ensemble

Nos affaires sont propres, rangées dans leur carton. Seule ma vieille plume de voyageur traîne encore sur notre table. Elle me semble triste, dépourvue de sens. Elle qui s'est remplie des meilleures encres, qui a gratté des papiers de tous horizons. Refaisons équipe une dernière fois. Attaquons cette ultime feuille de papier qui nous servira de testament. Ma gorge est serrée. Je me sens perdu, alors que je suis chez moi. « Bien sûr que cela va ! » Mais comment expliquer l'inexplicable ? Comment répondre à ces questions de courtoisie qui n'attendent pas forcément de réponse ? Une amie de voyage nous a offert une pensée amérindienne. Une pensée qui nous dit qu'après un long trajet, il faut donner du temps à l'esprit pour qu'il puisse retrouver son corps. Faudra-t-il que l'on attende les premières neiges ou cela sera-t-il plus long encore ? Si l'enveloppe n'a pas vraiment changé, j'ai un peu peur que la lettre soit différente : couverte de ratures, d'annotations dans la marge et de post-scriptum. Mais plus troublant encore, je m'inquiète de son utilité dans un monde de courrier électronique. Il ne nous faut pas céder mais « pousser » à l'image de ces arbres de Patagonie : avec lenteur et dans le sens du vent. Il nous faut nous souvenir de ces petits apprentissages qu'offre le voyage. Aujourd'hui, nous le savons ! Que nos « mondes » soient petits ou grands, ils ont des portes. Et ces portes, qu'elles soient petites ou grandes, ne sont jamais fermées à clé. OF 27.06.2014

Administratus helveticus


Le 17 mai 2014 annonçait bel et bien la fin de notre voyage. Mais plus encore, il était synonyme du début d'une nouvelle aventure : celle de la réinsertion. Loin de nous l'idée de mettre les pieds au mur. Pour être sincère, l'envie de réintégrer l'Helvétie ne nous laissait pas de marbre. A nous les douches chaudes, les boissons rafraîchissantes et la literie aux senteurs de lavande ! Mais s'intégrer ne rime pas avec profiter. C'est sur les chemins de l'investissement personnel, de la patience et de la quiétude que l'on flirte avec ce mot. Mais l’intégration, n'est-elle pas une douce illusion qui habille à merveille ce terme violent qu'est l'assimilation ? Soyons honnêtes, notre petit monde helvète fonctionne. Mais à quel prix ? Et je ne vous parle pas que d'argent. Je ne suis rien, pas même un numéro, pas même « l'ombre de ta main, l'ombre de ton chien. » Je vous épargnerai la complainte du voyageur traumatisé par un système trop lourd, trop intrusif, trop indifférent. Je ne vous balancerai pas non plus, avec nonchalance, ce sac d'anecdotes douteuses que l'on collecte aux portes de nos chères administrations. Ce monde vous le connaissez, vous l'habitez depuis bien longtemps ! Depuis trop longtemps ? On se construit des jardins secrets pour édulcorer cette réalité. On plante des graines de rêve et d'évasion que l'on arrose d'espoir. Si depuis le 17 mai, je me suis armé d'un stylo et d'un téléphone portable, j'ai également ressorti ma panoplie de jardinier. Et c'est peut-être là que réside le meilleur de notre société... pouvoir venir et s'en aller.OF 23.06.14

De Communal à Vevey

Le 16 au matin, nous quittons nos compagnons. Nous sommes tout chose car ça y est, cette fois nous pouvons le dire : demain nous arrivons à la maison. Comme s'il fallait le mériter pleinement, la bise s'est levée avec ardeur ce matin. Est-ce l'excitation qui nous rend imperméables à ce vent contraire et nous pousse à la chansonnette ? Ou le fait de savoir qu'il représente l'ultime effort de notre voyage et que nous pouvons alors tout donner ? Une fois le col de la Faucille derrière nous, nous plongeons dans le berceau du Léman; berceau qui est le nôtre également. Se dressent alors, sous nos yeux, les Alpes et son Mont-Blanc. Le voyage aura sans aucun doute éveillé en moi une sensibilité pour les montagnes enneigées. Et c'est avec ce regard nouveau que je redécouvre celles qui nous ont entourés durant tant d'années. Une fois le soir venu débute la série des « derniers » : dernier souper, dernière fois que nous montons la tente, que nous installons notre couche, dernière nuit du voyage... Le lendemain, cela se poursuit avec d'autant plus d'intensité : dernière fois que nous plions la tente, que nous équipons nos vélos... Dans la matinée, nous entrons sur sol suisse. Il s'en est fallu de peu pour que nous loupions la frontière car, une fois encore, le lieu est désert. Personne pour nous dire « Bienvenue en Suisse ! » A défaut de douanier, ce sont de petits indices qui nous ont réservé un accueil chaleureux : les plaques d'immatriculation, l'accent vaudois… Plus nous avançons, plus l'environnement nous devient familier. Nous reconnaissons d'abord les noms, puis les lieux, jusqu'à pouvoir les anticiper. « Dis, ça te va si on pique-nique dans deux kilomètres, je connais un coin sympa. » Assis sur les quais de Morges, le tableau qui se dessine devant nous semble presque irréel. Le lac, les cygnes, un vieux bateau de la CGN, les montagnes à l'horizon... Alors seulement, je réalise que l'idée que de nombreuses personnes, à travers le monde,se font de la Suisse n'est pas si erronée : un petit coin de paradis privilégié. A Rivaz, nous nous arrêtons sur la plage pour laisser passer les minutes qui nous séparent de l'heure du rendez-vous. Quinze heures quinze, allez, on y va ! La Pichette, La Crottaz, Corseaux-plage, Nestlé... encore un virage et nous déboucherons sur la rue que nous avons quittée il y a deux ans, un mois et onze jours. Le cœur s'emballe. Une silhouette, puis deux, puis tout un groupe de personnes sont là devant nous. Les larmes s'en mêlent. Familles et amis sont venus nous accueillir. A notre départ, ils nous regardaient nous en aller ici même, le visage tourné vers l'Est. Deux ans, un demi-tour vers l'Ouest, et nous revoilà. AG 17.05.14

De La Baneza à Communal


Notre atlas routier nous permet d'éviter les grands axes et de profiter au mieux de l'infinie toile espagnole. Mais quel que soit le chemin emprunté, deux questions reviennent constamment : « Vous faites le chemin ? », « Vous cherchez le refuge ? » Car s'il y a bien une célébrité en Espagne, c'est le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Mais notre refuge à nous, bien souvent, sera la forêt qui nous accueillera chaque fin de journée avec sa plus grande amabilité.
Entre l'Espagne et la France, il y a les Pyrénées. Et entre les Pyrénées et les Pyrénées, il y a Andorre. Alors après la chaîne de l’Himalaya, après la cordillère des Andes, pourquoi franchir les Pyrénées là où elles se meurent et ne pas profiter, une dernière fois, des lacets dansants d'un col à 2’408 mètres ? Est-ce l'expérience acquise, l'euphorie du proche retour ou l'air revigorant d'Andorre qui nous le fait franchir avec tant de légèreté ? Peu importe la raison, nous nous satisfaisons du plaisir éprouvé au milieu de ces montagnes enneigées. De l'autre côté du col d'Envalira, la France nous attend. « Bonjour, vous pouvez passer, bonne journée ! » Nous nous regardons, Olivier et moi, et d'un étonnement amusé nous nous disons : « Tiens, nous avons compris tout ce que ce douanier nous a dit ! » Et soudainement, il n'y a plus que nous au milieu d'individus anonymes. Il y a nous, et puis il y a tous ces individus dont les bribes de conversations volées au coin d'une rue, d'un étalage ou d'un café, nous font partager un fragment de leur vie. Et ceci, qu'on le veuille ou non... Et ceci, pour le meilleur et pour le pire. Au détour d'une averse, nous nous enfilons dans un café. Le lieu sent bon les croissants frais et le café chaud. Il y a là celui qui cherche désespérément le feuillet du tiercé, que nous échangeons contre celui de la météo, il y a celui qui boit son demi au comptoir, puis ceux qui refont le monde autour d'une grande table. Nous voilà bel et bien en France. Par contre, nous n'avions pas imaginé que ce pays était tant boisé et que ce vert qui nous a si souvent manqué nous entoure durant les quelques centaines de kilomètres qui nous amènent à la plaine du Rhône. Un détour par le village de Roquefort et nous nous offrons une pause gastronomique et instructive à notre régime vélo. Nous y rencontrons un ingénieur concepteur du réseau « voies vertes » (parcours dédiés aux vélos) qui nous donne quelques conseils sur les sentiers à emprunter. Une petite parenthèse routière qui nous conduit sous le viaduc de Millau. Puis ce sont les gorges du Tarn qui prennent la relève. Que la France regorge de régions magnifiques ! Nous nous rendons compte que nous avions auparavant l’habitude de visiter ce pays voisin avec un regard sévère. Alors qu'un même environnement, placé dans un continent différent, nous aurait épatés. Ce sont peut-être les 33'000 km. parcourus pour atteindre ce pays qui nous fait réaliser sa beauté.  
Le vélo d'Olivier a hâte de prendre sa retraite ou du moins de se mettre en pause ; un seul plateau reste fonctionnel et la pédale droite se fait constamment la malle. Olivier a depuis le temps adopté des stratégies pour pallier ces boiteries. Mais après une dizaine de kilomètres où je ne cesse de ramasser la fugitive, nous décidons d'intervenir. Nous tombons par hasard sur l'association Eve (écomobilité et voyage écologique), à Millau, qui offre une nouvelle pédale au vélo d'Olivier. Quelques dizaines de kilomètres plus loin, un cliquetis se fait de plus en plus présent. Olivier réalise alors que sa jante arrière est en train de se déformer sérieusement au point de buter contre l’un des patins de frein à chaque tour de roue. Nous sommes au fin fond des gorges du Tarn, la ville la plus proche est à une cinquantaine de kilomètres. C'est quitte ou double : ou l'on continue à pédaler avec le risque que la jante rende définitivement l'âme et que la roue ne puisse plus tourner, ou nous jouons la carte de la sécurité et poussons le vélo. Nous optons pour une solution intermédiaire. Nous poussons les vélos la plupart du temps mais lorsque la pente est suffisamment forte, je monte sur le vélo d'Olivier (question de poids) et je me laisse glisser. C'est alors que les avantages du voyage à vélo plutôt qu'à pied s'imposent à nous. A Mende, Olivier acquiert une nouvelle roue et nous pouvons pédaler à nouveau.
Le Rhône. Une étape en soi qui signifie que la Suisse n'est plus loin. Nous le longeons sur quelques kilomètres mais au lieu de prendre le chemin direct de la maison, nous nous en écartons pour une raison bien précise. Nous allons retrouver Régine et Michel, un couple de jeunes retraités que nous avons rencontrés en Bolivie et qui habitent au-dessus de Champfronier. Et par un heureux hasard, nous y retrouvons Magali et Stefan, le couple suisse que nous n'avons cessé de croiser durant tout notre périple en Amérique du Sud. Quelles magnifiques retrouvailles ! Six cyclo-voyageurs qui discutent dans le confort d'une maison chauffée, autour d'une table exquise... Le moment est délicieux et nous le prolongeons le lendemain avec une randonnée au sommet du Reculet. De là, nous voyons notre patrie... la poitrine tressaille. Demain, vendredi 16 mai, nous reprendrons chacun notre route. Cette fois, nous connaissons le lieu où la nôtre nous mènera... AG 15.05.14

A nouveau nous comprenons tout, pour le pire et le meilleur...